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Quand la Ville aligne ses rues pour prendre son visage moderne

Publié le

07/03/2023 - 11:30

Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi les rues Saint-Aubert, Ernestale et Gambetta ne forment qu’un seul axe bien droit depuis le Pont de Cité jusqu’à la gare ? Savez-vous pourquoi certains coins de rue ont été comme taillés à la serpe afin de laisser la place au trottoir ou à la chaussée ? Imaginez-vous pourquoi, dans certaines rues, toutes les façades sont si bien alignées ? Les réponses se trouvent toutes dans un seul et même document mis au point lors de la Reconstruction au lendemain de la Première Guerre mondiale : la Plan d’Aménagement, d'Embellissement et d’Extension (PAEE) qui fête ses 100 ans le 16 mars 2023.

Le plan trouve ses origines dans la loi Cornudet du 14 mars 1919. Cette loi de planification urbaine, obligatoire pour les villes de plus de 10 000 habitants, concerne aussi celles dévastées en partie ou en totalité lors du conflit. Elle leur impose d’établir un plan d’aménagement, d’embellissement et d’extension.

La ville d’Arras adopte son PAEE le 16 mars 1923 sous la mandature de Gustave Lemelle, mais elle travaille en réalité à sa reconstruction depuis 1917. Les maires précédents, Louis-Emile Rohart-Courtin et Victor Leroy, les élus et les techniciens ont l’ambition de faire émerger une ville nouvelle, favorisant l’hygiène, la circulation et l’esthétique. Dès 1918, la sous-commission « travaux communaux, alignements, expropriations » publie un avant-projet pour les nouveaux alignements de la ville assorti d’un plan au 1/1000e réalisé par Ludovic Roussel, architecte de la ville : Une cité rationnelle autour des monuments emblématiques d’Arras, reconstruits à l’identique. La ville d’Arras devance la Charte des sinistrés du 17 avril 1919, prévoyant la reconstruction à l’identique des monuments classés et la loi Cornudet du 14 mars 1919, première loi de planification urbaine, imposant aux communes dévastées d’établir un plan d’alignement.

Un projet précurseeur

Le projet de reconstruction de la cité atrébate, précurseur d’un urbanisme moderne, attire les regards. D’illustres urbanistes sont dépêchés à Arras pour en dessiner l’avenir.

Parmi les protagonistes du PAEE, figurent des précurseurs de cette science nouvelle qu’est l’urbanisme, comme  René DANGER, co-fondateur de l’Ordre des Géomètres-Experts, membre de la Société française des urbanistes, qui a levé le plan d’alignement de 1923 à l’échelle 1/200e, ou Léon Jaussely co-fondateur de la Société française des urbanistes, Grand prix de Rome en 1903, rapporteur de la Commission supérieure d’Aménagement, d’Embellissement et d’Extension des villes pour le PAEE d’Arras.

Plus de 67 rues d’Arras sont alignées au cours de la reconstruction. Le principe est simple : pour élargir et aligner les rues tortueuses et dévastées par la Première Guerre mondiale, des lignes droites sont tracées sur le plan de la ville. Toute habitation empiétant sur l’espace public projeté est alors alignée, « rabotée » afin de gagner des mètres carrés de rue. On coupe des maisons et on arrondit les angles aux carrefours, comme on peut encore le voir à l’angle de la rue des Grands-Vieziers et de la rue Ernest de Lannoy ou place des États d’Artois, par exemple. Certains propriétaires voient leurs habitations amputées, d’autres sont expropriés afin d’élargir les chaussées et aérer l’espace public.

L’avant-projet justifie déjà les alignements sur le constat suivant : « En partant du Pont-de-Cité vers la gare, on suit les rues Saint-Aubert et Ernestale qui forment en quelque sorte l’axe de la ville. Elles ont une circulation très active mais, sinueuses et étroites, elles forment avec les voies urbaines plusieurs carrefours dangereux, surtout depuis la circulation toujours croissante de rapides autos et de lourds camions. Les trottoirs y sont généralement très étroits ; à certains endroits on ne peut même  s’y garer des voitures. Ces rues réclament des élargissements urgents. Plusieurs des immeubles qui les bordent sont détruits, beaucoup d’autres gravement endommagés, très peu sont intacts. C’est une reconstruction presque générale qui s’impose, aussi devrait-on profiter des circonstances présentes, qui faciliteraient les expropriations pour l’établissement d’une large rue. »

De larges courants de circulation

Le plan prévoit d’établir de larges courants de circulation dont les principaux comprennent les rues Gambetta, Ernestale, Saint-Aubert, qui voient leur largeur portée à 14 mètres, la rue Méaulens, la place Sainte-Croix, la Grand-Place ainsi que les boulevards extérieurs. Les alentours des monuments emblématiques comme l’Hôtel de ville, la Cathédrale, l’église Saint Jean-Baptiste sont aménagés afin d’aérer ces quartiers et au besoin y établir des marchés. Le plan prévoit de dégager les voies d’accès importantes menant au marché de la Petite Place, de créer de nombreux pans coupés aux carrefours les plus fréquentés, de décongestionner les centres d’activité.

Le plan d’alignement intègre la salubrité publique. Ainsi, dans son projet de règlement de voirie et d’hygiène adopté lors du Conseil municipal du 1er juin 1923, la Ville développe différentes mesures : les maisons doivent être largement aérées, éclairées et ensoleillées le plus longtemps possible. Les habitations doivent aussi comporter deux pièces habitables hors cuisine et des cabinets d’aisance. De plus, chacune des pièces du rez-de-chaussée et des étages doit être « éclairée et aérée sur rue ou sur cour au moyen d’une ou de plusieurs baies ».

Le plan d’alignement se met  en œuvre : 71 rues sont impactées, 83 % des rues concernées par le programme de première urgence voient leurs travaux entièrement réalisés, 526 édifices au moins sont alignés dont 356 font l’objet d’un jugement d’expropriation en 1925 et 1927.

La Ville martyre de la Grande Guerre n’est plus, la ville nouvelle se reconstruit et l’Art déco investit ses rues.


La Grande Reconstruction dure jusqu’en 1934, année de l’inauguration de la Cathédrale.

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